vita mia, ho sofferto con te;
Bon alors tout le monde a une histoire, c’est évident. On sait jamais par où commencer pour la raconter, parce qu’on en a toujours beaucoup à dire, sauf quand on est comme moi... et qu’on préfère tout garder à l’intérieur parce qu’on sait que les gens peuvent jamais être complètement honnêtes quand ils disent qu’on peut leur faire entièrement confiance. J’ai toujours eu des problèmes avec ça, Bianca me l’a souvent reproché sans jamais n’avoir rien pu y changer. C’est de ma faute dans un sens, mais dans un autre, quand on se fait trahir par des gens qu’on considère être de la famille ou ce qui s’y rapproche. Bref, c’est pas le genre de truc à évoquer dans une conversation, et surtout pas à penser, en particulier parce que c’est ni l’endroit, ni le moment.
« Demi tu viens ? » J’me retourne, y’a mon pote Camilo derrière.
« Ouais j’prends mes clefs et j’sors. » J’me regarde une dernière fois dans le miroir et j’suis correct. Nouveaux vêtements offerts par ma belle-mère, rien que pour compenser le fait qu’elle soit pas vraiment ma mère et que j’arrive difficilement à accepter qu’elle soit avec mon père tandis que ça fait à peine 2 ans que ma mère est décédée. Quoi qu’il en soit, j’ai ma voiture et mes potes attendent dehors, du coup j’me dépêche de sortir et d’y monter. On va dans une fête qui est supposée être la fête de l’année. J’en doute fortement, surtout parce que la personne chez qui tout ça se passe est pas très… Bref, j’avoue que nous les Italiens, on sait fêter aussi. Si une fête commence mal, on sait comment la ranimer pour qu’en fin de compte, on en sorte complètement déchirés et vraiment heureux. Heureux d’être déchiré, évidemment.
« Tu sais où c’est au moins ? » J’retourne la tête vers Chris, assis sur la banquette arrière. J’lui confirme que oui, et que j’serai pas sorti si je savais pas où c’était… On aurait sûrement fait autre chose, comme aller en boîte même si on est pas encore majeurs. On en a l’air, c’est ça qui compte… Puis j’trouve toujours un moyen d’esquiver les videurs qui se croient intelligents en essayant de nous faire peur avec leur air de… Hm. Bon, on y est, j’stationne la voiture et on descend. J’suis habillé normalement, j’ai mis mon tout nouveau parfum – encore une gracieuseté d’Anna, la belle-mère – et j’avance.
« Les mecs, ce soir… Ce soir ça va être d’la bombe ! » Camilo me tape légèrement sur l’épaule et Chris a un sourire béat accroché au visage.
« Regarde là… La soirée commence en beauté. » J’pose mon regard à l’endroit où Camilo me pointe et j’repère une magnifique brune, carrément torride. J’pourrais tellement crier « jackpot » à voix haute, mais j’me ferai certainement repérer et c’est pas mon intention. J’veux pas qu’elle croit que j’suis cinglé ou un truc du genre… J’réserve cette étiquette à mes potes. Bref, si j’reste là à la regarder de loin, j’arriverai à rien… Je m’approche donc et j’vois un mec venir lui parler. J’m’arrête net. Fuck, j’me suis fait devancer… J’suis assez près d’eux pour entendre un brin de leur conversation et ainsi pour remarquer que finalement non, elle est pas avec ce lourdingue d’imbécile heureux de Spinelli.
« Y’a des chambres à l’étage ça te dirait de me montrer le chemin jusque là… Tu pourrais même rester avec moi et on pourrait apprendre à faire connaissance… T’en dis quoi ? » Elle croise les bras sur sa poitrine – qui m’a l’air bien généreuse – et rit de la proposition, ce qui a le don d’me faire sourire.
« J’en dis que tu devrais retourner jouer sous la jupe de ta mère avant de daigner adresse la parole à une fille qui est clairement pas de ton niveau… Si c’est comme ça que tu crois que tu vas t’faire une copine ou même une fille, tu rêves mon grand. » Il reste là, debout devant elle, bière la main, abasourdi. Pendant un moment j’ai l’impression qu’il va s’en aller plus loin, recouvert de honte. Mais non, c’pas le cas, ce qui me force à intervenir.
« Écoute-moi petite salope, tu reprends c’que tu viens de dire… Tu sais pas à qui tu parles en… » Je m’approche rapidement. C’est drôle comment Spinelli se la ferme rapidement en me voyant débarquer, gros sourire au visage.
« Alors Spin, tu peux pas te trouver une fille alors tu viens me piquer la mienne ? » J’fous mon bras autour de l’épaule de celle de la fille dont le nom m’est encore inconnu. Spinelli m’regarde.
« Tu la connais même pas… » « Mais si, de quoi tu parles… Elle et moi on s’est rencontré à… » « On s’est rencontré au Dolce Vita. » « Exactement. » « Tu connais même pas son nom. » « Demetrio Acciari. » Alors là, j’aurais jamais cru ça possible. La bombasse brune connaît mon nom, et même mon nom de famille, putain… En deux temps trois mouvements, Spinelli se casse, grognant des insultes à qui veut bien les entendre, et j’enlève mon bras de sur l’épaule de la brune, encore étonné qu’elle connaisse mon nom.
« Tu peux arrêter de baver là, ça veut pas dire que j’te cèderai non plus, compris ? » « J’connais même pas ton nom ! » dis-je, en souriant.
« Bianca Fetuccini. » Elle disparaît rapidement parmi la foule de gens qui sont présents… Va falloir que je mette les bouchons doubles pour l’avoir, parce qu’elle a clairement pas l’air de ces petites pétasses frivoles et fragiles qui usent de leurs charmes pour amadouer les mecs et qui regrettent vite-fait après… Surtout quand on a 17 ans.